Cela fait un certain temps que le Conseil Constitutionnel réclame un redécoupage de la carte électorale, pour que les différentes circonscriptions représentent chacune un nombre plus proche d'habitants. Le dernier découpage de 1986 avait été nécessaire car le gouvernement de Jacques Chirac remettait en cause la proportionnelle instaurée par François Mitterrand, d'où le retour aux circonscriptions. Mais les différences démographiques se sont accentuées, et aujourd'hui, les circonscriptions sont trop peu semblables en termes de population, quantitativement parlant. Ce genre de réformes ne peut être fait à l'approche des élections, sous peine de voir poindre l'accusation d'interventionnisme ministériel dans les règles du jeu électoral. Le secrétaire d'Etat à l'Intérieur et aux collectivités territoriales Alain Marleix est chargé de ce redécoupage, mais il est d'ores et déjà accusé de vouloir privilégier son camp, l'UMP, en faisant du sur mesure au service de ses députés. L'accusation est traditionnelle, et aurait certainement été lancée par l'UMP si ce fut le PS qui s'en était chargé.

Seulement, aussi tenté Alain Marleix puisse être de profiter de son pouvoir pour faire plaisir à ses amis, il risque de voir ses marges de manoeuvre limitées : les circonscriptions doivent englober des cantons entiers contigüs au sein du même département. Et en créant des circonscriptions imperdables pour la droite, il serait obligé d'en faire également, en négatif, des imperdables pour la gauche, où se retrouveraient tous les cantons penchant à gauche ne faisant pas partie des premiers. En outre, Alain Marleix n'a pas le pouvoir de forcer les électeurs à voter pour un camp ou dans l'autre, et jusqu'à présent, l'alternance a le plus souvent été la règle.

Cela n'enlève en rien le caractère sensible de l'opération, celle-ci reste un des plus grands enjeux politiciens du moment. En effet, les députés actuels, de gauche comme de droite, sont par définition contents de leur circonscription, puisqu'elle a voté pour eux. En changer la composition apporte une touche d'inconnu par les nouvelles populations qui rentront en compte, et qui représentent donc une menace potentielle pour la réelection. Si au niveau national, cela s'équilibrera globalement, les députés sortants craignent de mauvaises surprises individuellement. Toutes les circonscriptions n'ont pourtant pas à être redécoupées, seules celles s'éloignant trop de la moyenne doivent être concernées. Ceux qui seront surtout les mieux lotis, ce sont surtout les départements qui n'étaient pas assez bien représentés jusqu'à présent.