Un groupement de grandes entreprises allemandes est en train de méditer un projet qui pourrait avoir de grandes conséquences. Leur initiative, Desertec, part d'une idée simple : profiter de l'immense espace laissé libre par les déserts pour y puiser de l'énergie renouvelable. Leur première proposition est ainsi d'installer des centrales thermiques solaires (où la chaleur du soleil est captée pour faire fonctionner des turbines génératrices) au sein du sahara. L'absence d'activités dans ce désert, la faible présence de faune et de flore, et la chaleur écrasante sont autant de facteurs favorisants l'installation d'équipements générateurs d'électricité. Et plus ces installations seront grandes, et plus elles pourront bénéficier d'économies d'échelles. L'électricité produite pourrait servir non seulement les pays d'Afrique du nord, mais aussi ceux d'Europe, à condition de créer des lignes à très hautes tensions entre les deux continents. Certes, il y aurait alors une déperdition d'énergie pendant le transport, mais les avantages en terme d'ensoleillement sont tels que le gain serait toujours largement suffisant. L'argument massue est surtout qu'il y a chaque jour plus d'énergie potentielle dans le sahara que ce qui est consommé par la population humaine.

Évidemment, si les études sont déjà lancées depuis plusieurs années, il en faudra encore de nombreuses autres avant que ce projet commence à devenir réalité. Pour commencer, il faudrait développer une compétence en matière de centrales thermiques solaires. Celles qui existent actuellement ont montré l'opérabilité de cette façon de produire de l'électricité, mais leur taille est encore assez réduite par rapport à ce qu'il faudrait construire dans le sahara. Ensuite, les lignes à haute tension seraient un tout autre défi. On peut facilement prévoir que les questions qui se posent actuellement avec les gazoducs et oléoducs venant des pays de l'est se reposeraient de façon similaire. Quels pays traverser ? N'y aurait-il pas une trop forte dépendance entre les pays consommateurs et les pays producteurs ? Les pays d'Afrique du nord accepteraient-ils que les énormes fonds nécessaires pour un tel projet viennent d'Allemagne, leur laissant ainsi un contrôle sur une activité qui pourrait être amenée à être fortement rémunératrice, ou bien pourraient-ils préférer en prendre le contrôle, comme dans le cas du canal de Suez ou des exploitations pétrolières ?

Il faut néanmoins voir les fantastiques côtés positifs de l'opération. Ce projet pourrait être un vecteur de développement pour l'Afrique du nord quelques soient les modalités choisies. Et évidemment, Afrique et Europe pourraient bénéficier d'une source d'énergie renouvelable abondante, sans dommages sur l'environnement. Il serait dommage de ne pas tenter le coup. L'idée n'apparaît en fait pas si incroyable. On peut seulement se demander pourquoi personne n'a essayé de la mettre en œuvre plus tôt.