Quant à l'automne 2009, George Papandreou devint Premier ministre de la Grèce, ce pays était déjà durement touché par la crise économique mondiale. Par une décision pleine d'honnêteté, le nouveau gouvernement dévoila le fait que les comptes publics étaient dans un bien pire état qu'annoncé précédemment. En clair, tous les comptes et statistiques étaient truqués depuis des années pour faire paraître la Grèce économiquement plus saine qu'elle ne l'était en réalité. Le déficit public, à plus de 12 % du PIB révélait un pays vivant bien au-dessus des ses moyens, et trainant une dette trop importante pour donner confiance à de nouveaux prêteurs. La suite a découlé de ce terrible constat : mise en œuvre de plans de rigueur pour rééquilibrer les compte, privatisations, et appel à l'aide internationale pour se financer le temps que les réformes structurelles soient mises en place. Le traitement de cheval est à la hauteur de la maladie, mais les résistances viennent de partout en Grèce. La fraude fiscale généralisée, la corruption, les chasses gardées étaient si répandus que le changement de ces habitudes bloque très rapidement. En conséquence, ces réformes peinent à s'installer, et beaucoup sont ceux qui y mettent de la mauvaise volonté. Il semble plus urgent de protester que de chercher à voir comment s'en sortir.

Le dernier sommet européen devait justement apporter une nouvelle tranche de financement de la Grèce et une décote importante de la dette détenue par le secteur privé (à hauteur de 50 %) contre l'assurance que ces réformes seront poursuivis. Seulement, sans avoir prévenu qui que ce soit, George Papandreou a déclaré vouloir mettre ce nouveau plan à l'approbation des Grecs via référendum. Le procédé était navrant à bien des niveaux. D'abord, tout ce qui avait de rassurant dans ce nouveau plan fut ainsi soumis à une nouvelle incertitude, déclenchant la panique des marchés financiers. Ce n'est pas vraiment ce que doit rechercher la Grèce ces temps-ci. Ensuite, cela retardait d'autant la perspective des réformes supplémentaires, et bien évidemment des nouvelles rentrées d'argent. Enfin, c'était un référendum absurde, dans la mesure où le peuple ne pouvait se permettre de voter non, sous peine de ruine complète du pays.

Les autres dirigeants européens, se sentant trahis, ont tôt fait de rappeler à George Papandreou que le Grèce ne recevrait rien tant qu'il ne se serait pas sorti de cette situation, et que si on voulait faire un référendum, il fallait poser la bonne question : celle du maintien de la Grèce dans la zone euro. Les Grecs souhaitent très majoritairement garder l'euro. L'utilisation de cette monnaie est un symbole d'accès au rang des économies fortes, alors que la Grèce fut si longtemps un pays très pauvre. Seulement, cette accession n'allait pas de soi. L'euro devint la monnaie grecque en 2001, soit deux ans après les premiers pays. Ce fut un triomphe pour le gouvernement d'alors, dirigé par le PASOK, le parti socialiste grec.

Seulement, on l'ignorait alors, mais l'euro fut accordé à la Grèce sur la base de comptes truqués. Si on avait connu la véritable situation économique de la Grèce, on aurait certainement attendu bien plus longtemps avant de l'inclure dans la zone euro. Ce fut donc une erreur. Une erreur sur laquelle il est quasi impossible de revenir. Lorsque les conservateurs sont arrivés au pouvoir, en 2004, ils laissèrent les comptes continuer à se dégrader secrètement. Ce n'est donc qu'il y a deux ans que le pot aux roses fut révélé.

De tout cela, George Papandreou n'est pas coupable. Même si son père était Premier ministre jusqu'en 1996, et qu'il était ministre des Affaires étrangères entre 1999 et 2004, il n'était pas lui-même aux postes les plus concernés par cette escroquerie. En revanche, ce référendum était une tentative très malavisée d'obtenir un consensus, avec des conséquences très dangereuses pour la Grèce et l'Europe. Les Grecs eux-mêmes rejetèrent vivement cette proposition. Visiblement, la Grèce semble empêtrée dans des joutes politiciennes futiles. Après tout, les peuples ont les dirigeants qu'ils méritent. Vu la situation de la Grèce, l'heure devrait pourtant être à l'union nationale. Cela passerait par un changement de leadership. Avec son coup de poker à base de référendum, George Papandreou a définitivement perdu toute crédibilité en Europe et dans son propre pays. Son départ du gouvernement, aujourd'hui dans toutes les conversations politiques, est vraiment nécessaire.