Une bonne partie des difficultés rencontrées dans les négociations au sein des instances européennes peuvent être attribuées à des incompréhensions résultant de différences culturelles. A un problème donné, les approches peuvent varier selon les pays, de même que les références, les priorités ou la façon de communiquer. De telles différences culturelles peuvent être rencontrées dans toute forme d'organisation internationale (comme certaines associations ou entreprises), mais elles deviennent d'autant plus exacerbées lorsqu'il s'agit de mettre en oeuvre des politiques communes, quand chaque partie engage un peuple derrière soi. C'est en fait un des défis majeurs de l'Union Européenne, depuis ses commencements jusqu'à aujourd'hui et après.

Pourtant, il est possible de les relativiser. Après tout, dans un grand nombre d'Etats nation il existe des différences culturelles sensibles entre les différentes régions, et malgré quelques tensions occasionnelles, ces Etats arrivent à fonctionner. L'Allemagne par exemple a une structure fédérale, et des peuples ne partageant pas tout à fait la même identité entre la Bavière, la Ruhr ou l'ex Allemagne de l'est. Elle n'en n'arrive pas moins à dépasser ces différences quotidiennement. De même la France connaît toujours un certain nombre de régionalismes, et ne se présente pas moins comme une nation unie. C'est qu'au delà de ces régionalismes, il y a un fond culturel commun, des valeurs partagées qui rassemblent malgré tout.

Si l'on simplifie volontairement de façon très grossière les courants de populations européens, on peut arriver à quelques groupes "ethniques" qui ont interagi au cours des siècles, notamment les latins, les germains, les celtes ou les slaves. La France par exemple aurait selon cette façon de voir comme composantes de son identité de base la culture celte, la culture latine et enfin la culture germanique, mélangées au fur et à mesure. Elle connait d'étonnantes similitudes avec l'Italie, totalement latine, mais reste toutefois plus mesurée, s'orientant en cela vers une caractéristique généralement attribuée aux peuples germaniques. Selon cette optique, les cultures des peuples d'Europe pourraient donc être regroupées en quelques vastes ensembles, tout à fait capables de dialoguer les uns avec les autres après des siècles de cohabitation, voire même de s'influencer mutuellement.

Dans ce cas, il apparaît que les différents peuples d'Europe partagent une toile de fond commune. Il faut dire que le continent européen a été fréquemment traversé dans son intégralité par les mêmes vagues d'événements. Que ce soient par l'existence successive de vastes empires (romain, germanique, napoléonien), des guerres qui ont marqué de façon commune tous les peuples, ou par des mouvements religieux (la christianisation, la Réforme) ou artistiques (avec la Renaissance ou les Lumières), l'Histoire a bien donné aux peuples d'Europe des références et même des valeurs communes. Certains parleraient de civilisation occidentale, cela ne fait en tous cas que souligner le mouvement commun qui accompagne l'ensemble de l'Europe.

Tout cela forme donc une culture européenne, qui apparaît en filigrane des différentes cultures européennes. Elle ne s'oppose pas à elles, mais elle forme une unité qui en fait partie. Cette culture européenne fait partie de l'identité de chaque citoyen européen, et sur cela qu'il faut se baser pour la poursuite du projet européen.