Ces temps-ci, le prix Nobel de la Paix a perdu de sa superbe. Le comité s'était ridiculisé en le descernant à Barack Obama, alors que celui-ci venait à peine d'arriver à la Maison Blanche et n'avait rien fait de significatif. Le comité ne l'avait pas attribué à Vaclav Havel quand il en était encore temps, pourtant le chef d'orchestre d'une révolution majeure parfaitement pacifique et d'un passage à la démocratie réussi. Il ne pourra plus le recevoir, étant décédé en décembre dernier. Mais la décision de récompenser l'Union Européenne est parfaitement justifiée. Certes, cela amusera les Américains qui croiront que l'Europe se récompense elle-même, ignorant que la Norvège est justement en dehors de l'Union Européenne. Mais si l'on parle d'efforts pour la paix, alors la construction européenne est la plus belle réussite en la matière.

"Faire l'Europe, c'est faire la paix", a-t-on coutume de dire, à tel point que pour certains, cela n'a plus vraiment de réalité concrète. Car on a tendance à oublier que notre état de paix permanente n'a pas toujours existé, que des relations commerciales et amicales avec nos voisins européens n'allaient pas toujours de soi. Pour la France, le résultat est plus spectaculaire à l'échelle de l'Histoire. Cela fait 67 ans maintenant qu'elle n'a plus été en conflit armé avec un de ses voisins directs. Une éternité, et un record. Jusqu'à quand faut-il remonter pour voir un phénomène comparable ? A la pax romana de l'Empire romain peut-être ? Mais elle n'était pas sans soucis du côté de la frontière germaine.

La paix perpétuelle rêvée par Kant, nous l'avons à portée de main en Europe, au moins entre Etats membres de l'Union Européenne. La performance est impressionnante, et mérite notre gratitude. L'Union Européenne est un superbe projet, dont les effets bénéfiques se font sentir au quotidien, avec une telle réussite qu'on en oublie comment ce fut auparavant. Oui, elle a aidé la paix comme nul autre, et ce prix Nobel est parfaitement justifié.