Pendant toute la campagne des primaires républicaines aux Etats-Unis, la référence aura été Ronald Reagan, un Président aujourd'hui vu comme populaire, dont la victoire écrasante sur Walter Mondale en 1984 lors de sa réelection illustre le succès de sa politique et l'appui de celle-ci par les Américains. Pour autant, tout n'a pas toujours été facile pour Ronald Reagan : en 1976, il avait tenté de ravir la nomination républicaine au Président sortant, mais sans légitimité populaire, Gerald Ford. Les primaires furent difficiles, s'étirant jusqu'à la Convention. Lors de la couverture de celles-ci, les télévisions françaises qualifiaient Ronald Reagan de candidat de l'extrême droite, du fait de son libéralisme économique et de son hostilité envers les soviétiques. Gerald Ford gagna la nomination, mais perdu l'élection présidentielle. Son successeur, Jimmy Carter, fut battu à son tour par Ronald Reagan en 1980, après avoir enfin obtenu la nomination républicaine. Et avant d'écraser Walter Mondale en 1984, Ronald Reagan dut faire face à la perte de sièges républicains au Congrès en 1982. Il n'était donc pas si populaire que ça deux ans après son arrivée.

Mais la force de Ronald Reagan fut d'arriver à faire la synthèse sur le long terme des trois grandes familles de pensée des républicains. Il était farouchement conservateur et favorable aux valeurs prônées par la religion chrétienne. Il agissait pour les intérêts américains dans la géopolitique internationale en adoptant une stratégie particulièrement ferme face à l'URSS, ce qui constituait la doctrine des néo-conservateurs d'alors. Enfin, il martelait sans cesse ses convictions libérales, voulant des réductions d'impôts et la généralisation du laissez-faire en matière économique, une politique qui fut baptisée du nom de reaganomics.

Ronald Reagan avait ainsi des conceptions économiques proches des économistes libéraux et monétaristes. Son leitmotiv était issu de la courbe de Laffer, c'est à dire qu'il pensait qu'en réduisant les taux d'imposition, la création de richesse allait augmenter, guidée en cela par l'intérêt personnel, et qu'en conséquence, l'augmentation des recettes fiscales issue de cette augmentation de la création de richesse allait dépasser les baisses issues directement de la baisse des taux. Il considérait également qu'un gouvernement sain n'était pas en déficit, en préconisait de baisser le niveau de dépenses de l'administration fédérale. Dans son esprit, telle serait la voie de la croissance économique américaine. Et sa présidence a particulièrement bien correspondu à la décennie des années 80, qui étaient marquées mondialement par le libéralisme et la déréglementation.

Cette synthèse américaine est toujours d'actualité aujourd'hui. Les trois idéologies la composant peuvent toutefois s'en écarter. Les conservateurs chrétiens peuvent parfois sembler indifférent à la politique économique mise en place. Les néo-conservateurs veulent une armée forte, et donc coûteuse, ce qui nuit aux finances publiques. Les libéraux peuvent aussi avoir des considérations sur les thèmes de sociétés, ne voyant pas de problème à des choses comme le mariage homosexuel. Mais le libéralisme de Ronald Reagan est purement économique et non sociétal. Et du reste, la volonté de réduire les dépenses a bien failli suite à l'augmentation des dépenses militaires, ce qui a fait croitre le déficit public américain vers de nouveaux records. Sa réduction des impôts financée par l'augmentation du déficit lui valut même d'être considéré comme un keynésien par quelques économistes.

Son successeur, George H. W. Bush, fit face à une grave crise économique, et l'augmentation des impôts qu'il mit en œuvre fut très impopulaire et lui couta sa réélection en 1992. Mais un grand nombre d'Américains restent nostalgiques de Ronald Reagan, après une présidence de George W. Bush. L'administration de celui-ci est composée de membres de chacune des trois familles de pensée, mais il ne semble pas y avoir de personne arrivant à adhérer pleinement aux trois à la fois. En comparaison, Ronald Reagan reste l'homme de la synthèse.