Le Président Nicolas Sarkozy a annoncé le retour de la France dans le commandement militaire intégré de l'OTAN, faisant d'elle un membre ordinaire de l'Alliance Atlantique Nord. Cette décision est marquée par une polémique politique, critiquant ce mouvement. Deux argument sont donnés contre : ce retour briserait le consensus français quant à la Défense nationale, et la France deviendrait un vassal aveugle des Etats-Unis. Mieux vaut savoir ce qu'il en est.

Déjà, la fin du consensus national est un argument bien faible : rien n'empêche le consensus de se refaire autour de la nouvelle position de la France. Les socialistes peuvent critiquer ce retour, mais François Mitterrand était le premier à critiquer le départ de la France de l'OTAN sous le Général de Gaulle. Ce départ n'était d'ailleurs pas complet, puisque la France restait membre du Conseil de l'Atlantique Nord. La position du Général de Gaulle était la conséquence de l'acquisition de l'arme atomique par la France dans le cadre de la guerre froide. Elle lui permettait de jouer un rôle plus indépendant au niveau mondial, considérant que les Etats-Unis ne se risqueraient pas à l'utiliser en cas d'intervention soviétique en Europe de l'Ouest. Cela ne signifiait nullement que la France coupait tous ses liens avec les Etats-Unis pour autant. Le Président François Mitterrand a été ensuite le premier à chercher à intensifier ces liens, avant que Jacques Chirac ne réinscrive encore davantage les troupes françaises dans le cadre des opérations de l'OTAN. Aujourd'hui, la France est d'ores et déjà un membre important de l'OTAN, que ce soit en ressources humaines, matérielles, ou financières. Seul son pouvoir de décision est inférieur par rapport à la normal : sa présence est limité au comité des plans de défense, et elle est absente du commandement militaire intégré. Voilà ce que changerait l'évolution annoncée par Nicolas Sarkozy.

La force de frappe nucléaire française restera, elle, totalement indépendante. Ce qu'il se passe est donc une simple continuation des évolutions passées, sans vrai changement dans la position de la France dans le monde. Il y a simplement sa reconnaissance. On est loin d'une France devenue l'esclave des Etats-Unis en matière de défense. Déjà, contrairement à de nombreux autres pays européens, la France peut compter sur une armée forte, aux ressources conséquentes : elle n'est donc pas forcément en demande de protection. Ensuite, il suffit de regarder l'exemple allemand pour comprendre ce qu'est un membre normal de l'OTAN. Sous Gerhard Schröder, l'Allemagne a refusé de faire la guerre en Irak alors qu'elle n'a jamais cessé d'appartenir pleinement à l'OTAN. Elle reste un pays autonome qui n'inspirerait à personne l'idée de l'accuser d'atlantisme systématique.

La nécessité du retour de la France dans l'OTAN se voit justement dans le besoin d'une défense européenne. Jusqu'à présent, les projets d'Europe de la Défense ont eut très peu de succès. La raison en est simple : la grande majorité des pays européens y voyait un projet doublon par rapport à l'OTAN, qui apportait satisfaction. Cela laissait planer l'idée que l'Europe de la Défense était concurrente de l'OTAN, hostile aux Etats-Unis. En fin de compte, le problème de l'OTAN, c'était de n'être pas assez européen, et la réintégration de la France va alors dans la bonne voie. Javier Solana ou Angela Merkel l'ont d'ailleurs remarqué, et ont encouragé et félicité la France pour ce retour. Les pays européens peuvent solliciter l'OTAN pour qu'elle serve de cadre à des opérations purement européennes, et cela en fait justement la meilleure base pour l'Europe de la Défense. Au delà des polémiques de circonstance, la France peut être fière d'y jouer un rôle.