Après avoir sermonné aigrement la France sur la question des Roms, la commissaire européenne Viviane Reding s'en prend désormais vertement au couple franco-allemand pour ses propositions en matière de limitation des déficits. Comme toute proposition, celles faites par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy sont critiquables. Mais on peut se demander en quoi la commissaire pour la justice, la liberté et la sécurité a à s'exprimer sur ce dossier précis. Ceux qui sont le mieux placés pour analyser ces propositions sont les autres gouvernements, puisque c'est leur intérêt qui est en jeu. On peut même remarquer le portefeuille de Viviane Reding est une coquille vide, créé depuis quelques mois seulement, alors que la politique de sécurité de l'Union Européenne est prise en charge par une autre commissaire, celle aux Affaires intérieures, Cecilia Malmström. Alors forcément, Viviane Reding est condamnée à tenter d'avoir du poids sur des affaires qui ne la concernent pas vraiment.

Ce n'est d'ailleurs pas le seul poste discutable de la Commission Européenne. Le commissaire européen à l'élargissement a un rôle malsain, car il est voué à faire s'élargir l'Union, sans vraiment se poser la question de savoir si c'est une bonne chose en soi. C'est l'éternel histoire de l'homme qui avait un marteau et qui ne voyait plus les problèmes que sous forme de clous à enfoncer. Le commissaire à l'élargissement élargira, puisque c'est sa raison d'être. C'est le genre de choses qui donne l'impression aux citoyens européens, même ceux qui sont favorables à la construction européenne, que la Commission a tendance à former une bureaucratie qui tourne en vase clos.

Dans la Commission Santer de 1995, il y avait 20 commissaires, et deux vice-présidents (soit 10 % des commissaires). Dans la commission actuelle, il y a 6 vice-présidents pour 27 commissaires (soit plus de 22 %). Etait-ce bien utile d'augmenter ainsi le nombre de vice-présidents ? On retrouve ce genre de situations dans les communautés de communes, les conseils généraux ou régionaux, où il faut distribuer des honneurs factices. Mais il n'est pas sûr qu'une organisation fonctionne mieux en augmentant la proportion de vice-présidents. De même pour le nombre de commissaires mêmes. Selon la règle d'un commissaire par pays, l'arrivée des pays de l'est a fait augmenter de façon artificielle le nombre de commissaires, sans que les dossiers à traiter augmentent pour autant. Cela ne peut être qu'une source d'inefficacité.

Heureusement, le Traité de Lisbonne prévoit qu'à partir du 1er novembre 2014 (soit pour la prochaine Commission Européenne normalement), le nombre de commissaires soit réduit, passant aux deux tiers du nombre d'États membre. Dans une Europe à 27, cela ferait donc une Commission à 18. Cela laisse certes présager des psychodrames lorsqu'il faudra déterminer quel pays n'en aura pas, mais aussi une bien meilleure organisation lorsque cela sera mis en place. C'était soit ça, soit l'existence de commissaires sans portefeuille, comme dans certains gouvernements...