dimanche 16 décembre 2012
L'alternance des siècles de l'Eglise catholique
Par xerbias, dimanche 16 décembre 2012 à 15:16 :: Pensée politique
A travers le débat sur le mariage homosexuel, l'Eglise catholique française fait entendre sa voix, et c'était devenu assez rare. Sa prise de position a été accueillie avec mépris par la gauche, qui a pour l'occasion retrouvé les anciens réflexes laïcards, traitant la religion comme si elle était l'ennemie de la liberté. Il faut dire que ces dernières décennies ont été bien peu propices à l'Eglise catholique, et la progression des cultures soixante-huitardes s'est accompagnée d'une montée d'un athéisme parfois bien intolérant. Mais si l'on observe les choses sur des périodes plus longues, on se rend compte que cette perte d'influence du catholicisme n'a rien d'inéluctable, ce serait même cyclique. Des cycles certes très longs, puisque de deux siècles, mais remontant à bien loin.
Bien sûr, ces siècles ne collent pas parfaitement aux siècles comptés, ce sont des centaines d'années qui commencent et finissent un peu après la première année d'un nouveau siècle (comme 1901). Mais ces mouvements sont assez spectaculaire. Pour commencer, dans le cadre d'un conflit entre le roi de France et le pape pour savoir qui avait la primauté sur les biens de l'Eglise de France, Philippe le Bel entend montrer qu'il est le seul maître en son royaume, et ses envoyés giflent le pape Boniface VIII dans son palais. Ce n'est plus le temps du très pieux roi Saint Louis, avec la montée de l'Etat français de Philippe le Bel, c'est aussi le temps de la mise sous contrôle de la religion. Le XIVème siècle verra son influence grandement diminuer : l'ordre des Templiers est d'abord détruit, puis, après plusieurs années sans pape, le Français Jean XXII est finalement élu, et installe la papauté à Avignon, sous l'égide de la France. Le retour de la papauté à Rome sera même le motif du Grand Schisme d'Occident durant quarante ans à partir de 1378. Divisée, l'Eglise est forcément moins forte.
Evidemment, la fin du Schisme signe le retour en force de l'Eglise catholique lors du XVème siècle. Maître des Etats papaux, le pape est partie prenante lors des guerres d'Italie, et chaque faction intrigue pour placer le candidat de son choix sur le trône pontifical... quitte à être déçu après. Cette puissance amène même des abus, comme on le voit avec le népotisme éhonté pratiqué par les principales familles de l'époque, telle que les Borgia. Le pape Jules II finit même par faire la guerre directement pour régler ses comptes.
La position morale de l'Eglise finit par s'effondrer, et au début du XVIème siècle, le protestantisme apparaît comme un symptôme de révolte des fidèles contre une institution devenue trop corrompue. L'Empereur catholique Charles Quint ne peut empêcher que des pans importants de l'Allemagne quittent le catholicisme, Rome est mise à sac en 1527, et les tensions religieuses se transforment en de vraies guerres de religion, notamment en France. Au final, l'Europe occidentale est divisée, et elle n'est plus qu'en partie catholique.
A contrario, le XVIIème siècle est bien plus favorable au catholicisme. La Contre Réforme produit ses effets, et solidifie la religion des territoires restés catholiques. L'ordre des jésuites est à la manœuvre et son influence est redoutable dans les plus hautes sphères de la société. Au siècle de Bossuet, la religion regagne du terrain, et même Louis XIV en respectera davantage les enseignements sur la fin de son règne, influencé en cela par la très dévote Mme de Maintenon.
Les siècles se suivent et ne se ressemblent pas, puisque le XVIIIème siècle, le siècle des Lumières, fait la part belle au libertinage, mais aussi et surtout à l'implacable raison. Si Voltaire est croyant, il n'hésite pas à attaquer la religion comme institution rigide. En remettant en cause la parole de l'Eglise, c'est un pilier de la société d'alors qui est attaqué, et la révolution française se montre violemment athée, et essaye de détruire par la force et la propagande structures et sentiments religieux.
La tâche s'avère trop grande, et le XIXème siècle s'avère être celui d'un retour en grâce de la religion. Chateaubriand, avec son Génie du christianisme, en est le précurseur. Avec le romantisme, les artistes délaissent la trop froide raison et s'émeuvent des mystères de la religion, des temps anciens et de la force des sentiments. En France, cela s'accompagne bien sûr du retour de la monarchie, et dans toute la société, l'Eglise reprend son rôle d'institution incontournable.
Le XXème siècle, en revanche, est bien sûr un siècle de recul de l'influence du catholicisme en France. Cela commence avec les lois voulues par les radicaux pour la laïcité, notamment la séparation de l'Eglise et de l'Etat de 1905. Mais l'influence des idées communistes, foncièrement athées, puis libertaires dans la deuxième moitié du siècle engendrent une baisse de la pratique religieuse, ainsi que de la croyance. Et aujourd'hui, les églises sont bien peu remplies par rapport à autrefois.
Depuis longtemps donc, les siècles s'enchaînent, et lorsqu'un est négatif pour l'Eglise, le suivant est bien plus positif. Alors, pour le XXIème siècle, qu'en sera-t-il ? Celui-ci a en fait à peine commencé. Mais le catholicisme a déjà deux mille ans, cette longévité est une force, et si son importance évolue en suivant les mouvements d'un pendule, eh bien on peut alors penser que ce siècle sera celui d'un retour en force, encore une fois étonnant, de son influence. On sent déjà que les questions religieuses sont bien plus présentes qu'il y a vingt ans, l'Eglise pourrait donc bien attraper la balle au bond.
Bien sûr, ces siècles ne collent pas parfaitement aux siècles comptés, ce sont des centaines d'années qui commencent et finissent un peu après la première année d'un nouveau siècle (comme 1901). Mais ces mouvements sont assez spectaculaire. Pour commencer, dans le cadre d'un conflit entre le roi de France et le pape pour savoir qui avait la primauté sur les biens de l'Eglise de France, Philippe le Bel entend montrer qu'il est le seul maître en son royaume, et ses envoyés giflent le pape Boniface VIII dans son palais. Ce n'est plus le temps du très pieux roi Saint Louis, avec la montée de l'Etat français de Philippe le Bel, c'est aussi le temps de la mise sous contrôle de la religion. Le XIVème siècle verra son influence grandement diminuer : l'ordre des Templiers est d'abord détruit, puis, après plusieurs années sans pape, le Français Jean XXII est finalement élu, et installe la papauté à Avignon, sous l'égide de la France. Le retour de la papauté à Rome sera même le motif du Grand Schisme d'Occident durant quarante ans à partir de 1378. Divisée, l'Eglise est forcément moins forte.
Evidemment, la fin du Schisme signe le retour en force de l'Eglise catholique lors du XVème siècle. Maître des Etats papaux, le pape est partie prenante lors des guerres d'Italie, et chaque faction intrigue pour placer le candidat de son choix sur le trône pontifical... quitte à être déçu après. Cette puissance amène même des abus, comme on le voit avec le népotisme éhonté pratiqué par les principales familles de l'époque, telle que les Borgia. Le pape Jules II finit même par faire la guerre directement pour régler ses comptes.
La position morale de l'Eglise finit par s'effondrer, et au début du XVIème siècle, le protestantisme apparaît comme un symptôme de révolte des fidèles contre une institution devenue trop corrompue. L'Empereur catholique Charles Quint ne peut empêcher que des pans importants de l'Allemagne quittent le catholicisme, Rome est mise à sac en 1527, et les tensions religieuses se transforment en de vraies guerres de religion, notamment en France. Au final, l'Europe occidentale est divisée, et elle n'est plus qu'en partie catholique.
A contrario, le XVIIème siècle est bien plus favorable au catholicisme. La Contre Réforme produit ses effets, et solidifie la religion des territoires restés catholiques. L'ordre des jésuites est à la manœuvre et son influence est redoutable dans les plus hautes sphères de la société. Au siècle de Bossuet, la religion regagne du terrain, et même Louis XIV en respectera davantage les enseignements sur la fin de son règne, influencé en cela par la très dévote Mme de Maintenon.
Les siècles se suivent et ne se ressemblent pas, puisque le XVIIIème siècle, le siècle des Lumières, fait la part belle au libertinage, mais aussi et surtout à l'implacable raison. Si Voltaire est croyant, il n'hésite pas à attaquer la religion comme institution rigide. En remettant en cause la parole de l'Eglise, c'est un pilier de la société d'alors qui est attaqué, et la révolution française se montre violemment athée, et essaye de détruire par la force et la propagande structures et sentiments religieux.
La tâche s'avère trop grande, et le XIXème siècle s'avère être celui d'un retour en grâce de la religion. Chateaubriand, avec son Génie du christianisme, en est le précurseur. Avec le romantisme, les artistes délaissent la trop froide raison et s'émeuvent des mystères de la religion, des temps anciens et de la force des sentiments. En France, cela s'accompagne bien sûr du retour de la monarchie, et dans toute la société, l'Eglise reprend son rôle d'institution incontournable.
Le XXème siècle, en revanche, est bien sûr un siècle de recul de l'influence du catholicisme en France. Cela commence avec les lois voulues par les radicaux pour la laïcité, notamment la séparation de l'Eglise et de l'Etat de 1905. Mais l'influence des idées communistes, foncièrement athées, puis libertaires dans la deuxième moitié du siècle engendrent une baisse de la pratique religieuse, ainsi que de la croyance. Et aujourd'hui, les églises sont bien peu remplies par rapport à autrefois.
Depuis longtemps donc, les siècles s'enchaînent, et lorsqu'un est négatif pour l'Eglise, le suivant est bien plus positif. Alors, pour le XXIème siècle, qu'en sera-t-il ? Celui-ci a en fait à peine commencé. Mais le catholicisme a déjà deux mille ans, cette longévité est une force, et si son importance évolue en suivant les mouvements d'un pendule, eh bien on peut alors penser que ce siècle sera celui d'un retour en force, encore une fois étonnant, de son influence. On sent déjà que les questions religieuses sont bien plus présentes qu'il y a vingt ans, l'Eglise pourrait donc bien attraper la balle au bond.