Réflexions en cours

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dimanche 28 mai 2006

Dettes et déficits

En 2005, la dette publique française a encore augmenté, en passant de 64,6 % du PIB à 66,6 %. Dis comme cela, ça ne parait pas bien grave pour la plupart des gens, mais le montant de la dette a des conséquences. En l'occurrence, il s'agit de la charge de la dette, le remboursement des emprunts contractés par la France plus ses intérêts. Il ne faut certes pas oublier que le déficit public est généré tant par l'Etat que par les collectivités locales et les administrations publiques (le trou de la sécu est assez célèbre). Mais rien qu'au niveau du budget de l'Etat, la section "remboursements et dégrèvements" représenteront plus de 20 % des dépenses, avec 68 milliards d'euros. Le déficit, lui, est de 48 milliards. Cela veut dire que nous sommes condamnés à nous endetter pour payer nos dettes. Cela veut aussi dire que sans une dette aussi forte, l'Etat aurait davantage de crédits pour ses politiques publiques, ou bien pourrait baisser d'autant les impôts. Cela a de quoi laisser songeur...

Les critères de Maastricht prévoient que la dette publique doit être inférieure à 60 % du PIB, et le déficit public à 3 %. La Commission européenne se soucie davantage du second critère, car chaque déficit entraîne un emprunt pour le combler, donc une dette supplémentaire. Tant que les nouvelles dettes de la France seront supérieures aux dettes remboursées, la dette globale continuera d'augmenter, et avec les intérêts. Il est possible pour l'Etat d'emprunter, mais ce devrait être limité aux stricts investissements, qui s'amortissent ou qui entraînent des revenus supplémentaires par la suite. Or une grande partie du déficit de l'Etat provient de dépenses de fonctionnement, ce qui n'est pas sain. Il est donc nécessaire de réduire fortement la dette de la France, pour pouvoir plus tard dégager des marges de manoeuvre en ayant des charges de remboursement moins lourdes. Il est difficile de changer brusquement les comportements en ce qui concerne les collectivités locales et les administrations publiques. Mais pour l'Etat, cela suppose évidemment de faire en sorte que le budget soit équilibré, et donc réduire son train de vie.

A ressources équivalentes, la charge de la dette finira donc par fondre, et libérer ainsi des moyens qui a termes seront plus que proportionnels à l'argent économisé par la réforme de l'Etat. Certes, il ne sera plus possible de vouloir relancer artificiellement la croissance par le déficit. C'est pour cela que la Banque Centrale Européenne doit jouer le jeu elle aussi : en étant sûre que les critères de Maastricht, elle pourra et devra faire en sorte que sa politique monétaire prenne davantage en compte le facteur de la croissance économique, au lieu du seul contrôle de l'inflation. Mais en premier lieu, c'est en France qu'il est nécessaire d'avoir le courage nécessaire pour faire gagner en productivité l'Etat.

Project for the New American Century

C'est probablement ce qui se rapproche le plus d'une conspiration mondiale. Le think tank Project for the New American Century a été créé à la fin des années 1990 pour promouvoir la domination de l'Amérique sur le monde au XXIème siècle. Cette assemblée de néo-conservateurs souhaite que les Etats-Unis restent une puissance militaire très forte, afin de pouvoir garder la main sur les affaires mondiales et les orienter dans leur sens, avec l'intime conviction que ce qui profite aux Etats-Unis profite au monde entier. Il n'est donc pas étonnant de compter dans leurs rangs de multiples faucons, la plupart affiliés au parti républicain. En effet, puisque c'est la posture rigide de Ronald Reagan qui a permis à l'Amérique de l'emporter contre l'URSS, pourquoi devrait-elle relâcher ses efforts contre ses nouveaux ennemis, en l'occurrence les terroristes islamiques, ou de façon plus vaste tous ceux qui ne sont pas explicitement ses alliés ?

En fait de conspiration mondiale, on fait mieux : l'organisation n'est pas vraiment secrète, puisqu'elle se permet même d'avoir un site web expliquant au curieux ses prises de position. Néanmoins, le détail de ses effectifs montre du très beau monde, et en fait un organisme particulièrement influent. Voyons un peu : du côté des hommes politiques, on compte un ancien vice-président (Dan Quayle, qui l'était de George Bush père), le frère du président actuel (Jeb Bush), un ancien candidat à l'investiture républicaine (Gary Bauer), le secrétaire à la défense (Donald Rumsfeld), le vice-président actuel (Dick Cheney)... Chez les diplomates, on peut trouver entre autres l'ambassadeur des Etats-Unis aux Nations-Unies (John Bolton), l'ambassadeur américain en Irak (Zalmay Khalilzad), le président de la Banque Mondiale (Paul Wolfowitz), le secrétaire d'Etat adjoint (Robert Zoellick) et son prédécesseur (Richard Armitage), sans oublier des géopolitologues tels que Richard Perle ou Francis Fukuyama.

Ils ont tous souhaité la guerre en Irak, et comme ils sont en bon nombre aux postes de décisions clés, le lobbying en sa faveur n'a pas été problématique. Ceux qui n'étaient pas aux avant postes ont pu se concentrer à la justification de cette guerre au reste de la population américaine. Les difficultés actuelles en Mésopotamie les ont sûrement affaiblies. Mais ils gardent des convictions fortes. Ce sont celles des néo-conservateurs, qui ont établi une doctrine géopolitique nouvelle à la suite des enseignements de Leo Strauss. Par leur détermination, ils s'éloignent de la Realpolitik préconisée par Henry Kissinger. Et ils ne craignent certainement d'entrer en guerre si dans leur esprit il le faut pour atteindre leurs objectifs. Car leur puissance militaire fondera leur influence diplomatique, et à travers celle-ci, ils installeront à travers le monde la démocratie et ce qu'ils estiment être ses corollaires : le capitalisme, la liberté voire le libéralisme, et la non-hostilité envers les Etats-Unis. On peut d'ailleurs s'interroger sur le degré d'application que peut avoir cette doctrine avec les pays qui ont des intérêts opposés des leurs. C'est d'ailleurs l'aspect le plus inquiétant de la réflexion du PNAC : on peut comprendre qu'ils veuillent défendre les intérêts américains, mais en prônant une diplomatie trop "musclée", on voit s'éloigner les possibilités de dialogue en cas de différent, ce qui souvent contribue à aggraver les situations.

Il y a aujourd'hui de nombreux cas où les occidentaux sont presque à couteaux tirés avec des pays tiers. On peut citer les relations difficiles avec l'Iran, la Corée du nord, la Jordanie... Il y a aussi des conflits entre pays non-occidentaux qui risquent de dégénérer suivant le comportement des Etats-Unis et de ses alliés. Que faire, en effet, si un jour, la Chine décide une fois pour toute de reprendre Taiwan ? Il y aussi l'affrontement entre l'Inde et le Pakistan à propos du Cashmire, et bien sûr le proche orient en guerre permanente. Il ne convient donc pas d'aborder ces situations avec angélisme. Et pour ne pas se voiler la face, il ne faut pas négliger l'entretien des forces militaires. Mais il n'est pas souhaitable de prendre l'initiative de guerres aveugles, comme il a été fait avec l'Irak. L'idée de guerre préventive est donc à bannir. Les forces militaires doivent être en alerte pour réagir aux chocs qui peuvent arriver, mais non pour les provoquer. Et surtout, lorsqu'il existe des organisations internationales pour régler les différents, il est triste de penser immédiatement à utiliser la force pour obtenir gain de cause.

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