Dans le domaine du marché du travail, voilà le choix en définitive. Car comment expliquer sinon le fait que dans de nombreux pays d'Europe, le plein emploi prédomine ? Mis à part les pays scandinaves, qui mériteraient une étude dédiée, les autres ont atteint ce résultant en réformant en profondeur leurs marchés du travail, pour aboutir à un système où les emplois sont nombreux, mais précaires. En fait, cette précarité peut aussi se voir d'un côté positif, en l'appelant flexibilité. Il faut bien se l'avouer, les entreprises ont des besoins variables dans le temps, suivant les saisons et les conjonctures, et cela se traduit par des besoins variables en main d'oeuvre. On en profite en tant que consommateur, lorsque l'on dispose d'heures de services élargies, ou bien lorsque chacun prend ses vacances en même temps, nécessitant des capacités d'accueil accrues. Mais il est difficile de considérer que la main d'oeuvre puisse être une variable d'ajustement alors que ce sont bien des vies qui sont en jeu.

Il reste encore dans les mémoires des restes de la doctrine marxiste qui considère que l'entreprise exploite la plus-value générée par les travailleurs. Les entreprises sont pourtant génératrices d'activité et de richesse, et si les actionnaires engrangent bien les profits créés par leurs investissements (souvent risqués), de nombreux emplois sont créés par la même occasion. Les entreprises demandent de plus en plus de flexibilité à leur personnel, mais cela leur permet de croître, de créer de la richesse qui pourra être réinvestie dans de nouvelles activités, et donc de nombreux emplois. La rigidité du marché du travail, aussi sécurisante soit elle pour les employés, empêche les entrepreneurs d'embaucher facilement, le risque prit par une nouvelle étant trop gros alors que rien n'est sûr dans le domaine des conjonctures économiques. Plus un poste est difficile à supprimer, moins il aura de chances d'être créé. En système rigide, on arrive alors à un système où ceux qui ont déjà un emploi sont privilégiés, et où leur sécurité empêche de fait ceux qui n'en ont pas d'en trouver un. D'où le chômage. Un système sans flexibilité est un système où le chômage prédomine. De plus, c'est la croissance économique qui souffre de la peur de créer, du fait de risques plus conséquents. C'est donc toute l'économie qui en pâtit. C'est un peu ce qu'il se passe en France : un peu de flexibilité, du chômage en proportion inverse.

La formation tout au long de la vie doit permettre aux travailleurs de changer facilement de poste. Si les procédures de changement d'emploi sont courtes et efficaces, il ne faut pas craindre la flexibilité : elle permet la croissance économique, de donner un emploi à un plus grand nombre de personnes et donne des avantages indéniables aux consommateurs. Le principal verrou au plein emploi est d'ordre psychologique, c'est l'aversion au risque. Or la perdre de perdre son emploi se transforme en peur d'en créer, d'où une division profonde entre ceux qui en ont et ceux qui n'en ont pas. La flexibilité permettrait d'en donner à un plus grand nombre, et les avantages économiques qui en découlerait fortifieraient peuvent être suffisamment les entreprises pour qu'elles n'aient justement pas besoin de licencier. Le simple fait d'avoir cette possibilité peut leur donner suffisamment de confiance pour faire croître leurs activités, et justement ne pas y recourir. Au vu du passé, la crainte de la perte d'emploi peut se comprendre, mais si justement il est plus facile d'en retrouver, elle n'a plus de raison d'être.