Lorsque tout va bien au niveau économique dans un pays, d'autres thèmes font invariablement surface pour occuper le devant de l'actualité. C'est le cas de l'Espagne aujourd'hui, qui se paie le luxe de voir ses polémiques se concentrer sur la mémoire du franquisme ou la place de l'Eglise. Actuellement, l'Espagne connait un taux de croissance largement supérieur à 3 %, le taux de chômage est en chute libre, et la performance économique est d'autant plus remarquable qu'au début des années 90, l'Espagne présentait encore un profil de pays pauvre en Europe, avec un taux de chômage de 20 %, quand celui-ci n'est plus que de 7 % de nos jours. Ainsi, quand l'Espagne accueillait les Jeux Olympiques et une exposition universelle en 1992, elle souffrait malgré les trompettes qui résonnaient. Mais au cours de la deuxième moitié des années 90, l'Espagne a rebondi de façon incroyable, justement au moment où le Parti Populaire pris le pouvoir en 1996, en mettant José Maria Aznar au pouvoir. Cette réussite éclatante fut portée à son crédit, tant et si bien que lors des élections de 2000, le Parti Populaire fut reconduit sans difficulté, laissant loin derrière le Parti Socialiste Européen. Mais en 2004, alors que l'Espagne continuait à bien se porter économiquement parlant et que le Parti Populaire était largement favori pour les nouvelles élections, celui-ci fut battu, de très peu certes, et surtout à cause d'une question de politique étrangère (José Maria Aznar ayant accompagné les Etats-Unis dans l'escapade irakienne, et mis le attentats de Madrid sur le dos des terroristes basques, à tort).

José Luis Zapatero a succédé à José Maria Aznar au poste de chef du gouvernement, en étant appuyé par une majorité de gauche. Il n'a d'ailleurs pas vraiment modifié la politique économique mise en place par son prédécesseur, ce qui a d'heureuses conséquences. Pourtant le conflit est fort entre le Parti Socialiste Espagnol et le Parti Populaire, les attaques échangées ayant une certaine violence verbale que l'on retrouve rarement dans le reste de l'Europe. Mariano Rajoy, l'héritier de José Maria Aznar à la tête du Parti Populaire, regrette certainement la défaite, quand l'avenir semblait tant promis à son camp. Quelques mois auparavant, cette famille politique avait démontré l'efficacité de sa politique au plan intérieur, et bénéficiait d'un soutien important de la part de la population. Créé par une alliance entre libéraux, chrétiens démocrates et conservateurs, le Parti Populaire était le modèle assumé de l'UMP française lorsque celle-ci fut fondée par Alain Juppé. José Maria Aznar avait réussi à refonder une droite moderne, ancrée dans l'Europe, alors que la droite était auparavant largement associée au règne de Franco dans la tête des Espagnols. C'est de cette façon que Felipe Gonzales avait réussi à garder le pouvoir 14 ans, de 1982 à 1996.

La droite espagnole reste un modèle pour toutes les droites européennes. Evidemment, il y a les propositions politiques qui sont enrichissantes pour les voisins, si ceux-ci essaient d'appliquer chez eux ce qui a fonctionné en Espagne. Mais il y a aussi l'esprit général adopté par le Parti Populaire qui peut inspirer. L'adjectif "populaire" est particulièrement intéressant, car il exprime la volonté d'amener la politique au niveau du peuple, pour que celui-ci se l'approprie afin que celle-ci ne soit pas le seul fait d'une élite. Cela traduit aussi le fait que la droite n'est plus complexée, elle assume ses idées, des idées au service de l'intérêt général. En France, comme en Espagne, la droite a longtemps été suspectée d'être le camp des méchants, à cause de compromissions avec des dictatures par le passé. Si l'on a rien à se reprocher, il n'y a pas lieu de constamment s'excuser. L'Union pour un Mouvement Populaire se veut proche du Parti Populaire espagnol, et il n'y a à vrai dire peu de choses qui les sépare. Dès lors, on entrevoit la possibilité d'un véritable mouvement de droite pan-européen. Un mouvement populaire...