Au sein des institutions européennes, l'anglais semble prendre un poids de plus en plus important. Par un souci de qualité d'expression dans la langue anglaise, les porte-paroles sont souvent choisis en fonction de leur langue maternelle, assurant une forte représentation des Britanniques au sein des institutions. Même à la Banque Centrale Européenne, institution à laquelle le Royaume-Uni ne participe pas, il n'est pas rare de voir "English: native speaker" comme l'une des conditions d'embauche. Nombreux sont ceux qui, en France, regrettent cette domination de la langue anglaise, et y voient une preuve de la perte d'influence des cultures nationales face au rouleau compresseur anglo-saxon. Il est vrai que d'une manière générale, dans le monde des affaires, les milieux scientifiques ou même la plupart des communautés mondiales, l'anglais a bel et bien une place à part, car il y a un vrai avantage pratique à ce qu'une seule langue suffise à être apprise pour communiquer avec le monde entier.

Seulement, cela se transforme en un vrai problème lorsque parler cette langue avec l'aisance d'une langue maternelle devient obligatoire, là où "communiquer" est l'objectif premier. De même, il n'est pas normal que les Britanniques ou les Américains se sentent dispensés d'avoir à apprendre une langue étrangère, partant du principe que tout le monde parlera leur propre langue. Il ne peut en découler qu'un sentiment de supériorité qui ne forme pas les conditions d'une relation sereine et fertile. En découvrant de nouveaux pays, le voyageur comprend que la condition de la découverte est un véritable échange, un échange qui est largement facilitée en parlant la langue locale.

Les pays de l'Union Européenne ne doivent ni laisser chaque peuple parler qu'une seule langue, forçant des traductions tout azimuts, ni laisser s'imposer une langue unique. La véritable chance pour les peuples d'Europe est de parler plusieurs langues, multipliant ainsi les opportunités. Le multilinguisme est donc la solution naturelle aux questions de langue en Europe, c'est une qualité que l'on n'acquiert certes pas en claquant des doigts, et qui ne peut être répandue instantanément. Voilà pourquoi il faut favoriser dès maintenant le plus possible ce multilinguisme dans l'apprentissage des langues étrangères dans chaque pays d'Europe, y compris dans ceux qui s'en croient dispensés.