Il est difficile de dire que le débat d'idées fait beaucoup d'étincelles aujourd'hui sur la scène nationale. L'opposition, menée par un Parti Socialiste toujours au milieu de ses turpitudes traditionnelles, réagit de façon caricaturale à l'actualité, quand elle réagit. Mais du côté du parti majoritaire, ce n'est guère mieux. La seule personne de l'UMP qui se fait entendre actuellement est Frédéric Lefebvre. Devenu député suite à la nomination d'André Santini au gouvernement, il profite de sa fonction de porte-parole pour sur-réagir sur tout et n'importe quoi, et systématiquement en s'épargnant de réfléchir au contenu de ses paroles. Si Frédéric Lefebvre s'exprime autant, c'est en fait parce qu'il reste le dernier à l'UMP à vouloir faire son autopromotion, et que les autres sont plus modérés, notamment sur leurs prises de position et leur soutien au gouvernement. Surtout, il se trouve qu'il ne reste plus de grandes personnalités politiques à l'UMP. Il n'y a plus d'armée de réserve.

Si Nicolas Sarkozy avait promis un gouvernement resséré, c'était sans compter les très nombreux secrétaires d'Etat. Pour les recruter, il a fallu ratisser large, notamment dans les quadragénaires. Valérie Pécresse, Xavier Bertrand, Nadine Morano, Luc Chatel, Laurent Wauquiez étaient tous considérés comme des figures relativement nouvelles, et ils se voient tous dotés d'un portefeuille. Les poids lourds restés influents comme Jean-Louis Borloo ou Michèle Alliot-Marie y ont également trouvé bonne place. Alors qui reste-t-il d'à peu près important à l'UMP qui ne soit pas au gouvernement ?
- Jean-François Copé a récupéré la tête du groupe à l'Assemblée, mais ne se fait remarquer que par son ambition maladive. Il est actuellement très occupé à jouer sa carte personnelle auprès de ses collègues députés.
- Frédéric Lefebvre est arrivé au Parlement de façon la plus artificielle : parachuté au poste du suppléant d'une circonscription, étant entendu dès le départ que le titulaire à la réelection systématique démissionnerait une fois le suffrage passé.
- Patrick Devedjian est devenu secrétaire général par dépit d'avoir paru trop vieux pour devenir Garde des Sceaux. Il n'y prend que des coups, faute de deviner les pensées du Président de la République et à force de représenter un obstacle à d'autres ambitions (notamment dans les Hauts de Seine).
- Jean-Pierre Raffarin partage à peu près la même situation : vice-président de l'UMP, il aurait voulu un autre poste, et semble s'intéresser avec éloignement de son parti.
- Christian Estrosi a quitté le gouvernement pour avoir la mairie de Nice, mais cela ne l'empêche pas de cumuler avec un fauteuil de député. Ayant fait des caprices pour devenir secrétaire général adjoint, il partage ce titre à l'allure de hochet avec deux membres du gouvernement.
- Dominique Paillé, lui, est porte-parole, mais n'est plus l'élu de nulle part, à force de se faire battre à de multiples élections (législatives, sénatoriales...). Sans poid politique, sa fonction lui a été attribuée dans une volonté de le recaser d'une manière ou d'une autre.
- Jean-Claude Gaudin et Pierre Méhaignerie font désormais d'anciens de la droite en étant vice-présidents du conseil national, une position respectable, mais à l'influence modérée.
- Enfin, Chantal Brunel est elle aussi porte-parole, mais est restée pour l'instant discrète.

Et c'est tout. Une telle léthargie des responsables de l'UMP était largement attendue : c'était même une volonté de Nicolas Sarkozy, qui voulait éviter qu'apparaissent des responsables à hauts profils qui auraient pu restreindre sa marge de manoeuvre. Cela a parfaitement réussi dans l'absence de renouvellement, moins dans l'absence de contestation. Au sein du groupe UMP, des députés sans visages rechignent à toujours voter les mesures gouvernementales. Et à cela s'ajoute un trio de députés villepinistes qui étale fréquemment son amertume dans la presse. Mais au vu de cette UMP décapitée, les changements de gouvernements dont il est régulièrement fait rumeur ne pourront que donner l'impression d'un jeu de chaises musicales, étant donné le peu de ressources restant à l'UMP. Il n'est pas certain que sur le long terme ce soit une stratégie gagnante, alors qu'on peut déjà mesurer dans l'immédiat les effets d'un parti majoritaire profondément léthargique.

Image : Le Figaro/Delort