Une commission travaille actuellement autour de l'ancien Premier ministre Edouard Balladur pour étudier quels changements sont nécessaires dans la structure des collectivités locales. Plusieurs évolutions ont entraîné une telle remise en question. D'abord, le mouvement de décentralisation, avec un rôle de plus en plus grand attribué au régions, a commencé depuis près d'une trentaine d'années, et s'est poursuivi jusqu'aux dernières mesures en ce sens de Jean-Pierre Raffarin. Dans l'autre sens, les nombreuses communes françaises ont été encouragées voire forcées par les lois de Jean-Pierre Chevènement à la fin des années 90 à se regrouper en communautés d'agglomération, pour en théorie assumer à plusieurs les coûts de certaines infrastructures publiques, par exemples des piscines. Enfin, si l'on s'inquiète beaucoup du déficit du budget de l'Etat dans le cadre des critères de convergence du Traité de Maastricht, on oublie souvent que les déficits des collectivités locales rentre aussi en compte dans l'agrégat "déficit public". Et tous ces déficits cumulés ne sont pas minces, laissant présager certains problèmes d'organisation.

Si la démultiplication des échelons administratifs doit permettre qu'un problème soit réglé au niveau le plus approprié (certaines infrastructures de transport en commun concernent toute une région quand un nouveau stade ne concerne que quelques villes), elle ne doit pour autant entrainer un empilement des administrations. C'est malheureusement trop souvent le cas. Les communautés d'agglomérations sont emblématiques de cette évolution : la mise en commun des moyens de commune, une bonne idée en soi, s'est dans bon nombre de cas transformé en une occasion de multiplier les formalités bureaucratiques, d'embaucher des centaines d'agents pour faire vivre cette nouvelle administration, et dans les pire cas de créer un nouveau budget communication pour justifier le travail de la communauté d'agglomération. Dans la mesure où chaque commune, chaque département, chaque région n'oublie déjà jamais de généreusement doter son budget communication, les sommes perdues inutilement sont considérables au bout du compte. D'autre part, pour monter chaque projet d'infrastructure publique, les communes doivent désormais demander des subventions à la communauté d'agglomération, au conseil général, au conseil régional, voire parfois à l'Etat. A chaque fois, ce sont des études supplémentaires, et des votes de subventions parfois très longs à obtenir. On peut alors se demander si tous ces échelons sont bien utiles.

La suppression des conseils généraux est dans l'air du temps. Ce n'est pas une mauvaise idée. Trop petits pour avoir une réelle influence, trop grand pour être suffisamment proche de chaque dossier comme peuvent l'être les communautés d'agglomérations, leur rôle n'est pas assez défini. Ses attributions principales, l'entretien des routes et la gestion des collèges, pourraient être placées sous l'égide du conseil régional. Les Français aiment leur département, comme l'a montré la polémique invraisemblable sur les plaques d'immatriculation, mais le conseil général n'est pas le département, il n'est qu'une entité administrative dimensionné à cette échelle. Les conseillers généraux sont considérés comme proche des préoccupations des populations, une conséquence de leur élection au suffrage uninominal direct. Qu'à cela ne tienne, rien n'empêche les conseillers régionaux d'être élus de cette façon. Ils pourraient d'ailleurs se regrouper en commissions départementales au sein du conseil régional si certaines questions l'exigent vraiment. Au moins cela ferait l'économie d'une administration.

Bien sûr, tous les conseillers généraux sont d'ores et déjà debout contre de telles idées. Il est à craindre que leurs motivations ne soient pas celles de la défense de l'intérêt général, mais bel et bien de leurs mandats. Si le cumul des mandats venait à être supprimé, la question se poserait déjà moins. Mais il est une autre évolution que doit prôner la commission Balladur : la fin de la clause générale de compétences. Celle-ci permet à chaque échelon administratif de se déclarer compétent sur n'importe quel dossier. Ce n'est plus possible, les dépenses entraînées par des dépenses non obligatoires (parfois via des subventions vraiment fantaisistes) ont un coût énorme, à tel point que les missions obligatoires et vraiment nécessaires en voient leur financement menacé. Y mettre fin serait le premier pas vers une gestion plus rigoureuses des collectivités locales.