De par sa position géographique, l'Espagne est un pays facilement atteignable par les migrants d'origine africaine. D'abord par les enclaves de Ceuta et Melilla, puis via les îles Canaries, les flux d'immigration clandestine visant l'Europe ont été forts à destination de l'Espagne. Celle-ci a mis en place des mesures pour les limiter, mais la portée de telles politiques a été limitées par plusieurs régularisations massives qui ont eu pour effet d'encourager davantage l'immigration clandestine. Le gouvernement de José Luis Zapatero estimait, pour sa part, que l'immigration contribuait à la forte croissance de l'économie espagnole. En effet, l'agriculture était alors en pénurie de main d'œuvre, et les immigrés comblait ce manque pour des salaires très faibles. Mais aujourd'hui, la situation économique n'est plus du tout la même. Il s'avère que si l'économie espagnole a connu d'abord une croissance fondée sur le rattrapage des autres pays occidentaux, elle a ensuite été maintenue par un boom de l'immobilier qui a servi de moteur pour l'économie pendant plusieurs années. A tel point que le BTP représentait une part considérable de la population, demandant l'afflux de travailleurs provenant d'autres métiers. C'est de cette façon que de nombreux Espagnols ont quitté le travail agricole pour le bâtiment, un domaine plus rémunérateur comparativement parlant. D'où la pénurie subséquente dans les exploitations agricoles...

L'envol du marché de l'immobilier a eu comme conséquence de générer une bulle, qui a fini par crever avec la crise économique mondiale. Les projets ont alors été stoppés, et les licenciements ont été massifs dans ce secteur, se répercutant sur toute l'économie espagnole. En 2008, le nombre de chômeurs a augmenté d'un million de personnes, une hausse d'environ 50 %. Il n'existait alors plus aucune pénurie, le nombre de travailleurs excédant alors largement les emplois disponibles, et ce de façon d'autant plus grande que les régularisations massives ont alimenté cette augmentation de la main d'œuvre.

Aujourd'hui, le gouvernement espagnol prend conscience des difficultés posées par la situation. Il met en place des politiques incitant les travailleurs immigrés à retourner dans leur pays d'origine, quitte à payer là-bas les indemnités de chômage de ces travailleurs pendant trois ans. Le but étant de diminuer l'offre de travail, et limiter les effets d'un déséquilibre brutal qui déstabilise l'économie espagnole. Le risque étant l'apparition de tensions entre travailleurs... L'Espagne, hier considérée comme un exemple, est aujourd'hui un pays traversant un contrecoup violent, auquel elle n'était pas préparée.