L'Allemagne est le pays le voisin le plus important de la France, dans la mesure où ces deux pays constituent le moteur de la construction européenne. Enfin c'est ce qui a souvent été dit, mais depuis que les Français ont rejeté le Traité Constitutionnel Européen, il ne reste plus que l'Allemagne pour tenter de faire des progrès en la matière. C'est ce que cherche à faire Angela Merkel alors que l'Allemagne détient pour six mois la présidence de l'Union Européenne. Malheureusement, elle est assez bloqué en matière de prise de décisions quant aux institutions, étant donné que la France se concentre actuellement sur les élections présidentielles, et qu'aucune décision ne peut être prise avant qu'elles ne soient passées. Une fois le nouveau président français élu, il faudra aller vite dans les discussions pour qu'une solution soit trouvée au plus vite. Et alors que les Pays-Bas commencent à considérer l'idée de modifier seulement à la marge le Traité de Nice, les pays qui ont ratifié le Traité Constitutionnel Européen et qui voulaient qu'il s'applique en tous les cas commencent à reconsidérer la possibilité de faire un traité ambitieux pour les institutions, mais limité dans les sujets abordés. N'étant plus une constitution, ce serait une porte de sortie de bon niveau pour l'Europe, en attendant que les mentalités soient prêtes pour une Union Européenne véritablement fédérale.

L'influence que dispose de fait Angela Merkel dans les matières internationales lui vaut une grande popularité dans son pays. Les Allemands finissent par oublier la coalition bancale qui est au pouvoir, pour y reconnaître la main unique du parti d'Angela Merkel, la CDU. De ce fait la droite pèse de plus en plus lourd dans la prise de décisions, ce qui provoque évidemment l'énervement de la gauche : le SPD n'a pas de telle figure de proue. Les deux partis ont du faire un gouvernement d'alliance contre leur volonté, étant donné qu'aucune majorité ne s'était dégagé des élections législatives de 2005. Il n'y avait pas de souhait d'une telle coalition improbable au sein du peuple allemand, seulement une division égale entre les choix. Une certaine tension règne dans le gouvernement allemand au jour le jour, sans compter qu'à partir de 2008 chacun cherchera à se démarquer de l'autre en vue des législatives de 2009, ce qui rendra le pays ingouvernable ou sans réel gouvernement pendant un an et demi. Si des progrès ont été réalisés en Allemagne en matière de politiques économiques et sociales, on peut en fin de compte se demander si cela peut s'expliquer par l'entrée de la droite au gouvernement, alors que le SPD gouvernait seul avec les Verts les sept années précédentes.

Angela Merkel, qui appartient à un parti chrétien démocrate, peut donc nous apprendre des choses utiles pour notre politique française. L'envie de faire des réformes profondes, innovantes, comme dans le cas de la TVA sociale qui y est expérimentée. Mais aussi le fait qu'il vaut mieux des coalitions voulues, plutôt qu'elles soient forcées, faites avec une mauvaise volonté.Ce n'est pas vraiment ce qu'en a retenu François Bayrou, chrétien démocrate lui aussi, mais qui a voulu obliger ses opposants à lui obéïr. Pour faire prévaloir ses idées, il est plus efficace de les apporter à travers des accords clairs de politiques à appliquer une fois au gouvernement. Par dessus tout, l'Allemagne nous rappelle quotidiennement que la relance de la construction européenne est urgente. C'est pour cela que nous devons choisir la voie qui permet une relance rapide, et d'une façon acceptée par les autres pays d'Europe qui nous attendent.