La doctrine libérale enseigne que le meilleur ordre possible est atteint lorsque chacun est libre d'agir selon ses convenances, avec le marché qui fixe l'équilibre entre l'offre et la demande, et qui donne à chaque agent économique l'information sur ce qui est utile de faire. Dans un tel cadre, l'Etat n'a pas vraiment sa place. Il est vu par les libéraux comme un obstacle à l'ordre naturel qui se met en place lorsque chacun est parfaitement libre. Il n'est toléré que pour garantir la sécurité de chacun, et pour empêcher qu'une entreprise prenne tant d'importance qu'elle en devienne un monopole qui limiterait la liberté des autres, ou pourrait amoindrir l'efficacité du système. Lorsque le libéralisme est appliqué également aux questions sociétales, cela devient du libertarianisme. C'est une vision du monde où la liberté individuelle est absolue, ce qui garantirait le bonheur de tous. La main invisible devient alors le principe moteur de toute la société, et non de la seule économie. Dès lors, le nombre de lois est très limité. L'Etat est vu comme un monstre tentaculaire, toujours tenté de s'étendre plus, qu'il faut combattre pour le contenir que dans le plus strict nécessaire.

Mais à force de prôner de plus en plus de libertés, et de moins en moins d'Etat, l'idéologie libertaire se rapproche de celle anarchiste. En effet, l'anarchisme voit également en l'Etat la structure qui fait que tout va mal. Toutes les règles et lois que celui-ci oblige les citoyens à respecter fait que l'ordre naturel des choses en est dérangé. Pourtant, l'anarchisme est considéré comme étant une mouvance d'extrême gauche, lorsque le libertarianisme, qui est un véritable courant politique aux Etats-Unis, est clairement marqué à droite par rapport à une gauche interventionniste. Ainsi, lorsque des principes opposés sont poussés chacun à leur extrême, ils finissent par se rejoindre. L'extrême gauche et l'extrême droite ont des ressemblances frappantes, notammant car elles se rejoignent sur l'adossement sur le totalitarisme. L'axe politique devient en fin de compte un cercle, où se trouvera d'un côté le centre, et de l'autre l'extrême, totalitariste.

La société communiste théorique annonçait également la disparition de l'Etat... Mais elle était précédée par la dictature du prolétariat de la société socialiste, qui n'était que la dictature de la bureaucratie. Si l'anarchisme d'extrême gauche rejoint le libertarianisme de droite sur leurs visions de l'Etat et de la liberté, il reste une distinction sur la propriété. Propriété considérée comme étant du vol, selon l'un des premiers anarchistes, Pierre-Joseph Proudhon. Il y a bien un courant anarchiste qui reconnaît la propriété, ce sont les anarcho-capitalistes. Mais la distinction reste floue, la seule question de la propriété empêchant ces deux aboutissements de raisonnement de se rejoindre totalement. Pourtant, chaque idéologie prône la recherche d'un maximum de liberté. Mais alors, qu'est-ce qui garantit le mieux cette libérté : la possession ou l'absence de possession ?