Alors que la campagne électorale commence à être bien entamée désormais, certaines personnalités politiques restent encore en retrait. C'est le cas de Dominique Strauss-Kahn, mal utilisé par Ségolène Royal. C'est le cas des derniers chiraquiens, comme François Baroin, qui attendent que Jacques Chirac annonce sa décision sur une éventuelle candidature. Prétexte aussi utilisé depuis longtemps par Dominique de Villepin pour éviter de prendre position. Il y a également le cas de Jean-Louis Borloo. Le gouvernement doit travailler jusqu'au bout dit Président de la République. Le ministre de la Cohésion sociale lui suit ce mot d'ordre à la lettre, et est l'un des derniers ministres à connaître une activité toujours constante, et peu importe que la session parlementaire se soit achevée. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il n'a pas sa place dans cette campagne, bien au contraire. A l'automne dernier, au dernier congrès du Parti Radical (qu'il co-préside avec André Rossinot le maire de Nancy), il a refusé de prendre parti en faveur de Nicolas Sarkozy, alors que sa formation politique fait partie de l'UMP. Pendant ce temps-là, François Bayrou répond, lorsqu'on lui pose la question, que Jean-Louis Borloo pourrait faire partie de ces personnalités pouvant travailler avec lui dans le cadre de son gouvernement de la gauche, du centre et de la droite.

Il est pourtant peu probable que Jean-Louis Borloo soutienne avant l'élection présidentielle François Bayrou, même s'il n'a probablement aucune hostilité envers lui, ayant été son porte-parole lors de la campagne de 2002. Mais Jean-Louis Borloo se trouve être ambitieux, par pour viser à long terme la Présidence, mais ambitieux pour son pays, pour amplifier le travail qu'il a accompli ces cinq dernières années. Cette fois-ci, il souhaite donc accéder à Matignon pour avoir les coudées plus franches quant à la mise en place des mesures qui lui sont chères. Actuellement, il dit passer ses soirées à les décrire dans un livre qui doit bientôt sortir. Elles sont la base de sa discussion avec Nicolas Sarkozy pour effectuer son ralliement à la candidature de ce dernier. Le candidat de l'UMP serait bien inspiré de profiter de l'inspiration sociale qu'apporte Jean-Louis Borloo. Et s'il est trop tôt pour penser à se distribuer les postes, Jean-Louis Borloo doit rester un premier ministre potentiel pour celui qui veut être président, en compagnie de François Fillon ou de Michèle Alliot-Marie. Ces trois premier-ministrables ont tous des sensibilités différentes de celles de Nicolas Sarkozy, et donc complémentaires. Il doit en tenir compte dans sa campagne, car le rassemblement qu'il doit opérer passe par là.

En l'occurrence le soutien de Jean-Louis Borloo a un poids politique supérieur à ses propositions, alors qu'elles sont déjà fortes. Il peut être vu comme une possibilité pour Nicolas Sarkzoy d'occupper le centre, alors que François Bayrou semble occupper de plus en plus d'espace dans le paysage politique en reniant son appartenance à la droite. D'une manière générale, Nicolas Sarkozy a plusieurs cartes centristes à jouer, car une bonne partie des membres de l'UMP sont justement d'inspiration centriste, et sont autant démocrates-chrétiens que le candidat de l'UDF. Ils doivent pouvoir s'exprimer fortement pendant cette campagne. Il peut aussi compter sur le soutien de Simone Veil, femme politique estimée de tous, et dont la parole a d'autant plus de poids qu'elle est rare (car elle était soumise au devoir de réserve en étant au Conseil Constitutionnel) et réflechie. Les accomplissements de celle-ci dans les gouvernements et au niveau européen, et sa force de conviction peuvent être très utiles au candidat, pour orienter son propre discours, et pour convaincre des indécis. Et pour le cas particulier de Jean-Louis Borloo, on peut sourire en pensant que le Parti Radical pourrait avoir de nouveau le rôle de faiseur de roi, ou plutôt de majorité, rôle qui lui était dévolu dans les IIIème et IVème République.